Par Mahjoub Aouni
Dès le début de la Pandémie Covid 19, nous assistons à une importante mobilisation des virologues, généticiens et bioinformaticiens pour séquencer le génome des différentes souches, caractériser les différentes mutations et chercher les corrélations entre mutation et virulence/pathogénicité, des souches circulantes du Sars-CoV2. Ces donnés sont primordiales pour mettre en place la stratégie préventive et le traitement. Dans le cas du Sars-CoV2, les mutations sont fréquentes comme chez tous les virus à ARN .Chercher les corrélations entre profil génétique et virulence/pathogénicité/immunogénicité sont des indicateurs primordiaux pour mettre en place une stratégie de préparation d’un vaccin efficace. Les données bibliographiques dans ce domaine ont décrit une mutation particulière qui a retenu l’attention des chercheurs jusqu’au mois de juin /juillet.
Il s’agit de la mutation “G614” qui se localise au niveau de la séquence 23403ème nucléotide du génome (sachant que la taille de ce génome est d’ environ 30000 Pb). Cette zone du génome correspond au gène codant pour la protéine de l’enveloppe du virus ( Spike) . Notons que c’est au niveau de cette protéine que le virus se fixe à son récepteur (ACE2) , au niveau de sa cellule hôte (la cellule sensible).Cette mutation consiste en un changement ponctuel d’une adénine par la guanine. Mutation qui se traduit au niveau de la protéine par un acide aspartique à la place de la glycine. Ce changement a favorisé l’émergence d’une nouvelle souche G614 douée d’un pouvoir de transmission très élevé, mais pas très pathogène. Cette souche gagne toutes les régions du globe en subissant des mutations jusque là insignifiantes (mutations ponctuelles) sur son pouvoir pathogène, mais très virulente (multiplication productive et transmission importante). En octobre, une autre souche a été décrite au nord est de l’Espagne(20A-EU1)chez un cluster, qui s’est diffusée à la suite de l’ouverture des frontières. Actuellement elle tend à gagner du terrain en Europe à la suite de la mobilité des touristes. 12 pays sont actuellement touchés.
La surveillance de ses souches du Sars-CoV2 est renforcée partout pour contrôler l’éventuel passage des souches humaines vers l’animal et vis versa. Quelques données ont décrits le passage des souches animales à l’homme.
Au Danemark, pour prévenir la propagation d’une souche de Corona qui se transmet du vison à l’homme et qui est douée d’un pouvoir de propagation très important (haut pouvoir replicatif), le gouvernement a pris des mesures préventives rigoureuses en procédant à l’abattage de tous les visons dans les élevages où un cluster est déclaré.
Cette souche, étant faiblement immunogène, risque de compromettre l’élaboration d’un vaccin efficace contre elle, si elle vient à s’implanter et devenir dominante, d’où l’importante vigilance prise par tous les pays Européens.
Pour la Tunisie le risque provient essentiellement de la mobilité des personnes.
Les mutations sont un processus normal chez ce groupe de virus. La vigilance s’impose pour contrôler l’éventuelle émergence de nouvelles souches avec de nouveaux profils.