Par Mansour M’henni
Le 20 mars 2021 aura fait couler beaucoup d’encre, surtout sur les pages des réseaux sociaux, c’est-à-dire dans ces espaces de liberté d’expression spontanée jusqu’au débordement, mais sincère jusqu’à la noblesse et la sagesse, en ces temps où la noblesse n’a rien d’une éthique et où la sagesse n’a de logis que la vieille Utique.
Le 20 mars a une symbolique et un goût divers dans plusieurs pays du monde et pour des sociétés variées. On l’évoquerait bien pour référer au Norouz, cette fête millénaire des Perses d’hier, des Iraniens et des Kurdes d’aujourd’hui. Ce jour est aussi dans le vent des temps présents, en milieu francophone, surtout en cette année qui prolonge, par le fait de la Covid, la commémoration de la création de l’ACCT (Agence de Coopération culturelle et technique, fondée en mars 1970, deviendra l’Organisation internationale de la francophonie – OIF), dont Habib Bourguiba est l’un des quatre fondateurs.
Mais le 20 mars a un goût spécial en Tunisie, c’est la fête de l’Indépendance obtenue, à coups de grands sacrifices, en 1956, pour constituer une plateforme solide et un pilier inébranlable de la Tunisie moderne. Quelles que fussent les conditions et les circonstances, on n’a jamais vu la Tunisie tergiverser sur la célébration de cette date fondatrice, sauf depuis 2011. Que s’est-il donc passé ?
Avant 2011, les Tunisiens pouvaient s’opposer entre eux et jouer à l’escrime avec leurs idéologies variées et leurs visions politiques opposées, mais l’indépendance les faisaient se retrouver dans une communauté nationale et une unité patriotique jamais mises en défaut. On pouvait contester Bourguiba et haïr même Ben Ali, mais on aimait toujours la Tunisie indépendante, la Tunisie du 20 mars 1956.
A partir de 2011, des forces occultes et leurs sbires s’acharnent à placer un nouvel antagonisme dans le corps de la société tunisienne et à le placer principalement dans le 20 mars, la date de l’Indépendance. Leur objectif est de faire de ce facteur d’union une source de dissensions et de conflits, parce que leurs idéologies ne peuvent agir que dans et par les rancœurs et les animosités. Ils ne peuvent s’accommoder d’une société de conversation fondée sur le respect des différences et sur le principe de solidarité. L’exclusion est leur pratique poussée jusqu’à ses extrêmes, l’effacement, la liquidation, la négation, le nettoyage par le vide, tout cela reformulé dans un langage éthique affublé de l’étoffe d’une pureté illusoire.
N’empêche que malgré ce dédain caractérisé exprimé à l’égard de la fête de l’Indépendance, parfois par un silence honteux ou un mutisme complice, ayant atteint les premiers responsables de la sauvegarde de la dignité de l’Etat et de sa mémoire pour savoir édifier son avenir, ce dédain donc a trouvé devant lui une frontière infranchissable dans un peuple acceptant parfois certaines concessions pour éviter la catastrophe, mais jamais se départant de la Patrie et de ses valeurs symboliques dont l’Indépendance est la première. Cette force citoyenne est descendue dans la rue, tous les 20 mars de la dernière décennie, et a exprimé son attachement à cette date charnière, sur la toile, de plusieurs façons mais toujours avec le même cran.
Cette force citoyenne dit ainsi aux chefs des manigances : « Méfiez-vous de l’ombre qui vous sert de frêle couverture ! Le soleil du Grand jour et sa lumière de l’Indépendance vous dévoilent déjà et vous brûleront peut-être ! »