A la Maison de la Culture Ibn Khaldoun : Exposition personnelle de Mohamed Melki
« Regards esthétiques et plastiques en temps de pandémie »
Onze tableaux de grands formats ornent actuellement les cimaises de la Galerie de la Maison de la Culture Ibn Khaldoun à Tunis. C’est l’exposition personnelle de l’artiste-peintre Mohamed Melki qui nous propose de voir ces dernières créations abstraites, peintes avec beaucoup de tact et de sensibilité, moyennant une technique mixte où toute une gamme de matériaux est utilisée pour obtenir ces belles peintures de haute qualité.
Tous les tableaux exposés peuvent atteindre jusqu’à 250 cm de longueur et plus de 100 cm de largeur. Il est vrai que l’artiste a dû fournir de grands efforts et consacré un laps de temps assez long pour réaliser ce genre de tableaux qui, d’ailleurs, ne peuvent être que ravissants pour les amateurs d’art contemporain. Monumentales, lumineuses et attrayantes, ces œuvres dégagent une véritable poésie et apaisent les sens. Décidément, Mohamed Melki s’illustre par ces tableaux de très grand format.
Ses tableaux, denses mélanges de traits, de signes, de symboles, de formes et de couleurs, sont de thèmes variés : allant de la peinture de la tradition vers l’expression des sentiments en passant par des hommages rendus aux anciens peintres, notamment à feu Néjib Belkhoja et aux illustres peintres de l’Ecole de Tunis. Combinaison d’un ensemble de matériaux (ciment blanc, vernis, sable, mastic, feutre, collage, peinture…), un tourbillon de couleurs vives et des formes indéfinies emplissent joyeusement ses toiles. Dans toutes ces créations, l’artiste nous a confié qu’il n’avait pas utilisé de pinceaux, mais c’est grâce à l’habilité de ses doigts qu’il a pu tracer les lignes, dessiner les formes, étaler les couleurs, toucher, palper, pétrir, frotter, effacer pour enfin arriver au résultat escompté.
« Essadaya », ce tableau, fait sur trois plans superposés, nous rappelle le travail artisanal du tisserand : on y distingue des trames de fils entrelacés, des points, des lignes, une diversité de couleurs, à travers lesquels on peut percevoir des objets artisanaux comme une « kachabia », un « mergoum », un gilet de berger ou un « clim ».
« A travers la fenêtre » fait voir Sidi Bou Saïd à travers une fenêtre en fer forgé : une nouvelle approche plastique de la description de cette ville pittoresque où, moyennant un style plutôt abstrait, des lignes, des formes, des signes, des petits carrés, des couleurs (blanc et bleu et vert), l’artiste illustre la beauté architecturale et l’aspect traditionnel des maisons étagées sur une pente.
Notre artiste, inspiré par la COVID-19 qui s’est abattue sur nous, comme beaucoup de peintres chez nous et dans le monde, s’exprime à travers deux tableaux destinés à cette pandémie dévastatrice. « Un cri au temps du corona » et « Résistance et fierté de la Médina ». Le premier représente une tête humaine attaquée, à gauche et à droite, par le virus, comme prise dans un étau. Le second exprime cette détermination dont fait preuve la ville pour lutter contre ce virus. La nuance des couleurs évoque une lueur d’espoir.
« Nostalgie de la Médina» est un autre tableau qui représente la ville ancienne, vue à partir des toits des maisons, où l’on aperçoit un arc-en-ciel avec toutes ses couleurs, ses maisons adjacentes et enchevêtrées et ses ruelles resserrées et quasi obscures, vues d’en haut.
Bref, dans cette exposition, Mohamed Melki s’est intéressé à la pandémie certes, mais tout en conservant sa prédilection pour nos traditions, adoptant une démarche plastique contemporaine. Une exposition qui vaut le déplacement.
Hechmi KHALLADI