On se réveille du lourd sommeil de notre mort et on se remet à vivre. Dans ce récit, un mort retrouve la conscience, retrouve la mémoire, redécouvre la vie, celle qu’il avait vécue. Il redécouvre le langage, les personnes, les objets, les paysages…Le récit crée une illusion qui déréalise le réel, fugace comme un rêve, mais qui nous submerge et auquel nous nous fions. On ne doute guère de l’évidence d’une réalité multiple, plurielle. On redécouvre la vie après que nous avons longtemps disparu. Cette vie d’autrefois ressuscitée sous le regard de celui que nous avons été. Un récit en strates, en incertitudes, relatant un réel brouillé parce que polymorphe, polysémique, avec autant de réalités que de regards, où le doute est certitude, et la certitude un doute. ” Et puis les hommes revinrent. Lentement. Comme dans un ralenti. Les portes s’ouvrirent une à une. Des silhouettes encore floues, un peu embarrassées se glissèrent sur le trottoir, se croisèrent, se dépassèrent…C’est alors que je l’aperçus. C’était bien elle. Elle marchait d’un pas rapide, enveloppée dans un de ces imperméables qui en faisait une silhouette anonyme glissant sur le trottoir, une passante parmi les autres dont il était difficile de percer le secret. “Territoires de l’obscur”, un récit concis, condensé, à la limite du surréel, à lire d’un trait.
Mohamed Kertach