Pendant la décennie noire qui a vu l’islamisme politique triompher – modérément en Tunisie mais bien plus dramatiquement dans d’autres pays arabes-, les hôtels touristiques des villes côtières ont dû s’adapter au nouveau type de clientèle imposé par le contexte d’alors. On ne servait plus d’alcool, sinon, on le faisait très discrètement et au profit de résidents privilégiés au nombre extrêmement réduit.
Dans les piscines, le burkini éclipsait toute autre mode de maillot de bain. On se sentait mal à l’aise même en short et torse nu. Les chambres indiquaient toutes la qibla pour les prieurs et les prieuses. C’est à peine si les plages et les pistes de danse ne se transformaient pas en aires de rassemblements religieux intégristes.
Je suis content aujourd’hui de voir nos unités hôtelières se libérer des diktats daëchiens. Les touristes locaux et étrangers n’ont plus peur d’être traités comme de sataniques impies. On sent les hôteliers délivrés du poids des hypocrites mesures auxquelles ils étaient directement ou indirectement forcés.
Mais il faut reconnaître que la menace est toujours persistante d’un retour, voire d’un raffermissement de l’islamisme hégémonique intolérant.
Récemment, le chef inamovible d’Ennahdha Rached Ghannouchi déclarait à un journal koweitien que cet intégrisme est une hydre à plusieurs têtes impossible à anéantir totalement.
Ce qui n’est pas faux. Obligation donc de persévérer dans le combat contre ce monstre hideux qui mine les esprits et détruit toute velléité progressiste. En s’opposant à l’avènement d’un nouveau régime autoritaire, les anti-Saïed doivent clairement se distinguer des mouvements soi-disant similaires que dirige ou soutient le parti de Ghannouchi et celui de Makhlouf.
Autrement, l’amalgame est facile et instantané. Une certaine Gauche tunisienne peu populaire est actuellement en train de rendre de précieux services à Ennahdha et à ses alliés (anciens et nouveaux). L’islamisme politique regagnera de la sorte plus de terrain. Et le plus triste dans cela, c’est que notre Gauche souvent gauche n’a manifestement rien retenu des leçons de ses cuisants revers du passé tout récent.
Elle s’entête dans le même jeu et dans les mêmes positionnements qui l’ont pratiquement ruinée.
En définitive, elle n’a jamais trouvé la solution ni contre Bourguiba ni contre Ben Ali ni contre Ghannouchi et ses sbires multicolores, ni bien sûr contre le projet de Kaïs Saïed.