Dans une chronique du 28 février 2023, suite à ce qui aurait l’air d’un malentendu, amplifié peut-être pour différentes raisons, un avis concernant la question de la migration africaine a été avancé en ces termes : « ces problèmes migratoires peuvent être sagement étudiés et efficacement poussés vers des solutions régionales édifiantes. […] La diplomatie est alors mise à l’épreuve de la conversation avec les pays d’origine pour que des solutions, même partielles et provisoires, soient trouvées, avec l’intention de les faire évoluer vers une maîtrise non humiliante de la situation de ces populations, en concertation et en coopération avec les instances internationales et les pays supposés être des défenseurs de la dignité humaine ».
Aujourd’hui, en réécoutant et en relisant les mises au point, même tardives, et les décisions prises dans mon pays concernant nos frères de l’Afrique subsaharienne, je me sens réconforté, rassuré même quant à l’essentiel de la dépendance inaliénable de la tunisianité et de l’africanité. Je retrouve enfin l’image de cette Tunisie-Ifriqiya dans sa fierté d’être ce qu’elle est vraiment, sans heurts avec les autres liens qu’elle hérite de son histoire, de sa culture et de ses interactions économiques et civilisationnelles. Je crois voir avancer fièrement la Diplomatie tunisienne dans les hourras d’une foule où il me semble distinguer le visage de Bourguiba, mais aussi les silhouettes de tous ceux qui, avant lui, avec lui et après lui, ont su défendre la dignité humaine indépendamment des différences de tous genres entre les peuples et les personnes. Je crois sincèrement qu’il y a lieu de passer par la diplomatie, son éthique et sa pratique, pour retrouver le chemin paisible d’une Tunisie en développement et en intelligence interactive avec son environnement international.
Mais qu’est-ce donc que la diplomatie pour en faire une école de la socialité et de la gouvernance ? Au-delà du sens politique qui en fait une profession de haute valeur, celui de « Science et pratique des relations politiques entre les États », il y a ce que les dictionnaires considèrent comme son sens figuré et qui me paraît son sens propre, inhérent au principe de la socialité humaine, le sens d’une « diplomatie publique », celui d’un être à l’Autre dans l’adresse, la finesse et la souplesse. Si ce deuxième sens est un objectif de citoyenneté, les deux sens réunis doivent caractériser les responsables politiques, toutes responsabilités et tous niveaux confondus. Le comportement et les propos de ces derniers sont appelés à s’inscrire de façon permanente et non discriminatoire dans leurs interactions de tous ordres parce que le plus petit manquement à ce devoir peut porter préjudice à l’équilibre social et à la culture du vivre ensemble, tant sur le plan national qu’international.
Pour la situation présente, concernant la Tunisie, il y a eu des erreurs et des maladresses à traiter la question migratoire et à la façon d’en rendre compte. La conscience de cette erreur est sans doute derrière tous les éclaircissements ajoutés et les décisions prises. L’essentiel est de savoir tirer profit de ses erreurs.
Mais les forces politiques en démarcation par trop violente à l’égard du pouvoir en place se doivent, elles aussi, de revoir leur façon de se situer et de commenter de telles situations quand l’image de leur pays dans le monde et ses relations internationales, souvent déterminantes d’une part de ses conditions internes, risquent d’en pâtir ou de s’en ressentir.
Encore une fois, l’essentiel pour l’honnêteté de l’action politique, pour autant qu’on puisse en parler ainsi, réside dans la solidarité nationale en cas de danger, une solidarité conversationnelle pouvant mettre, pour un temps au moins, les divergences politiques, à la marge de l’engagement collectif en vue du sauvetage de la patrie.