A la mémoire de Mohamed Boussarsar, brillant doctorant et instituteur exemplaire
Plusieurs personnes que j’ai connues et que j’ai aimées ont perdu la vie dans des accidents routiers en plein centre-ville ; d’autres ont été gravement blessés. D’autres encore ont subi un choc psychologique irrémédiable. Que se passe-t-il ? Comment s’explique cette violence routière ? Je n’ai pas de réponse claire mais il m’est insupportable de voir, dans les zones urbaines, de plus en plus de jeunes et d’adultes perdre la vie à cause de la bêtise de certains conducteurs assassins qui – quelle horreur ! – s’enfuient en laissant souvent leurs victimes mourir.
Avant, on avait eu certes des accidents dans les grandes villes, mais ils n’engendraient pas tant de décès, tant de drames. Après le 14 janvier 2011, un changement radical s’est produit. Il est possible d’être renversé par une folle voiture alors qu’on attend tranquillement un bus ou un taxi. Il est également possible d’être cloué sur une chaise roulante toute sa vie parce qu’un conducteur roulait à 120 km à l’heure en ville et qu’on se trouve sur sa trajectoire en faisant de la marche joyeusement avec des amis. Ah bon Dieu, comme il est facile de mourir pour une petite course dans son quartier ! Au cours des prochaines années, avec l’augmentation effrayante du nombre des véhicules, chaque promenade en ville va-t-elle devenir « une corde qui vous tient au-dessus de l’abime et qu’on entend craquer » à chaque passage de camion et de voiture « jusqu’à ce qu’elle se casse » (Victor Hugo, “Le Dernier jour d’un condamné”) et qu’on soit tué ?
Comment s’expliquent ces tragédies routières à répétition ? Est-ce l’absence totale de civisme et de moralité chez certains conducteurs ? Est-ce l’imprudence des piétons ? L’état de certains véhicules qui n’ont pas subi de contrôle technique depuis des années en toute impunité ? Le non-respect du code de la route ? L’état lamentable des routes ? L’envahissement des trottoirs par des présentoirs des magasins ainsi que par les tables et les chaises des cafés, des restaurants et des gargotes obligeant les piétons à prendre des risques ? Les travaux interminables des municipalités, de la SONEDE, de la STEG ? Les embouteillages ? Le comportement imprudent de certains taxistes ou de certains conducteurs de gros camions qui traversent les avenues et les petites ruelles en exhibant leur puissance et en menaçant les conducteurs des petites voitures ? L’absence de radars fixes et de caméras ? L’incapacité de la police de tout contrôler dans toutes villes tunisiennes ?
Quelle que soit la cause de l’accident dans les villes tunisiennes, quelle que sa forme, il faut lutter contre ce fléau, car il est une vraie menace pour nous et pour nos enfants. Les parlementaires doivent abandonner les polémiques et les querelles de souk et de Hammam pour se consacrer aux vrais problèmes des Tunisiens !