Heureuse à plusieurs égards est la rencontre organisée le 15 mars 2023 à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Sousse par son département de français et son Laboratoire Littérature Ecole et Communication, en partenariat avec l’Association pour la Culture et les Arts Méditerranéens (ACAM) !
Heureuse d’abord parce qu’elle a permis de rendre hommage à feu Nejib Ayed, le premier doyen de ladite faculté. C’est en effet dans un geste fondateur, enthousiaste et engagé, qu’une petite équipe d’enseignants de la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Kairouan et de l’Ecole Normale Supérieure de Sousse, encadrée et encouragée par le président de l’Université du Centre à cette date de l’année 1989, feu Chedly Bouzakoura, s’est mobilisée et a résisté pour ce projet qui n’a été ni sans conflits ni sans sacrifices. Il s’agit d’un passé à dépasser certes, mais il conviendrait d’en tirer les leçons éthiques et pratiques qui se doivent, notamment la reconnaissance du mérite des initiateurs et des fondateurs, auxquels une justice est due pour l’édification de cet important établissement de l’enseignement supérieur.
Heureuse aussi, cette rencontre du 15 mars 2023 parce qu’elle a fait, elle aussi, l’effet d’un acte inaugural, celui d’une rencontre annuelle de réflexion, d’interrogation et de conversation autour de l’école, tous niveaux intégrés, une rencontre à pérenniser et à développer en vue d’une culture de l’éthique sociétale prenant naissance dans l’exercice d’apprentissage et en vue d’une intelligence juste, rationalisée et efficiente de la gouvernance et des ambitions civilisationnelles. On doit cette décision au Laboratoire dirigé par le Professeur Nizar Ben Saad et à ce partenariat heureux des structures d’enseignement et de recherche avec le tissu associatif représenté à cette occasion par l’ACAM, elle aussi reconnaissante à feu Nejib Ayed aux premières années de sa constitution, lui qui a été également, durant plusieurs années, à la tête de la Direction générale de l’innovation pédagogique.
Ainsi, des enseignants et des chercheurs de différents niveaux et de nombreux établissements nationaux se sont retrouvés pour échanger le fruit de leurs expériences respectives et les prémisses de leurs réflexions prospectives. Une conférence inaugurale a constitué la plateforme de base des débats, majestueusement présentée par une personnalité des mieux placées en la matière, Pr. Mohamed Hatem Ben Salem de par sa longue expérience dans la diplomatie et à la tête du ministère de l’Education, deux fois, où il avait initié plusieurs projets de réformes, avortées malheureusement pour des raisons dont il importerait de raisonner les effets et les causes.
De l’avis des présents (une présence moyenne de 80 personnes), l’école tunisienne est en peine et en danger même. D’aucuns ont parlé d’agonie, mais l’orientation générale a été vers l’optimisme qu’autorisent l’intelligence et l’efficacité des compétences tunisiennes pour peu qu’on leur fasse confiance et qu’on leur fournisse les moyens d’action nécessaires. Est-ce un hasard que plusieurs intervenants aient évoqué Socrate ? Cela a permis, au-delà des questions techniques, de s’interroger surtout sur la pertinence et l’opportunité d’un projet de « l’Ecole conversationnelle », ou l’école de la conversation, qui repenserait la pédagogie (donc plus largement que la didactique) dans sa structure interactive et horizontale, sans sacrifier le sens de l’organisation, de la discipline et de l’éthique néo-humaniste inhérente à un tel projet.
Vaste programme ! Espérons d’abord dans la pérennisation et le développement de cette première rencontre qui pourrait garder son titre générique « Aujourd’hui l’école » tout en variant un sous-titre à chaque édition. Mais espérons aussi dans la multiplication de telles initiatives dans le cadre d’une stratégie de convergence et de coopération solidaire pour recréer notre école conformément aux défis du présent et aux paris de l’avenir !
Publié sur jawharafk.net