A l’heure où presque tout le monde déplore que les jeunes Tunisiens boudent la lecture des livres en général et de la littérature en particulier, Samir Marzouki persiste et signe en publiant son deuxième recueil de récits jeunesse, qui plus est en langue française. “Cinq histoires de trésors” paraissent en effet à une période où la langue de Molière est malmenée dans le parler d’une bonne partie de ses utilisateurs tunisiens, et jusque dans nos nouveaux manuels scolaires censés en principe dispenser aux jeunes générations un français sinon pur et élégant, du moins simple et correct.
Il faut saluer également l’audace de l’éditeur Moncef Guellaty (Déméter) qui fait le même pari en publiant de la littérature jeunesse avec le double espoir de réconcilier nos adolescents avec la lecture, la rêverie, l’évasion, et en même temps de rattacher ces jeunes lecteurs à leur patrimoine national et régional puisque les décors de chacune des “cinq histoires de trésors” sont tunisiens et méditerranéens à part entière : cela se passe dans les vieilles maisons de la médina de Tunis, sur un îlot au milieu d’un lac salé dont les riverains portent des noms très familiers, à Kairouan, au cœur d’une pinède d’Aïn Draham, au milieu d’une oasis de Tozeur.
Les héros eux-mêmes sont très proches du jeune lecteur tunisien et méditerranéen : leur féconde imagination les entraîne dans des aventures que ce dernier a comme l’impression d’avoir vécues lui aussi entre 10 et 16 ans. C’est que les “cinq histoires de trésors” ont une inspiration commune : le terroir tunisien pluriel et diversifié et en même temps le creuset culturel extrêmement riche que représente le bassin méditerranéen.
Sans prétention idéologique aucune, sans la moindre démagogie, ce deuxième recueil de récits jeunesse de Samir Marzouki défend humblement mais plaisamment les trésors insoupçonnés que sont la jeunesse, l’ouverture d’esprit, la diversité culturelle, l’intelligence créatrice, l’ambition, le courage et la persévérance. Il ne s’agit guère de nouvelles ou de contes édifiants, mais, entre les lignes, Samir Marzouki ouvre des voies multiples qui pourraient inspirer la jeunesse tunisienne, maghrébine, africaine, désemparée et pour qui seuls l’émigration, la fuite et l’exil se présentent comme remèdes au désenchantement et au désespoir ambiants.
Perçues sous cet angle optimiste, l’écriture et la publication de ces récits jeunesse se justifient pleinement. Nous reviendrons sans doute avec plus de détails sur les “Cinq histoires de trésors” intitulées respectivement : Le trésor de la forêt des chênes, Le trésor de Othman Lahrayri, Inès et le trésor du corsaire, La cave au trésor et Le trésor de la palmeraie.
** Cinq histoires de trésors, de Samir Marzouki, Déméter, Tunis, Septembre 2022, Prix public : 16dinars500.
BADREDDINE BEN HENDA