Leur statut d’orphelins expose de nombreux enfants dans le monde à toutes les formes d’exploitation. Si cette catégorie d’individus n’est pas convenablement prise en charge au sein de la famille et de la société, le risque est grand qu’on finisse par en faire une source de trouble, de désordre et d’insécurité pour tous. S’attendrir sur le sort des orphelins, leur apporter individuellement ou même collectivement une aide circonstancielle ne suffit guère pour les prémunir contre les malveillances diverses et les graves sentiments de manque, d’infériorité et de marginalité dont ils peuvent pâtir toute leur vie parfois.
Chez nous, ce sont souvent les membres les plus proches de la famille qui viennent au secours de l’orphelin : un grand frère, la sœur aînée, un oncle, une tante, un grand-père ou une grand-mère, un cousin charitable, se sacrifient, se relaient aussi, pour entourer l’enfant des soins nécessaires notamment au double niveau psychologique et économique. Quelquefois, la famille peut au contraire devenir un foyer d’exploitation immonde pour l’enfant sans parents. Les cas ne se comptent pas qui témoignent d’usurpation de biens, de traitements violents, de négligence, d’abandon ou de pédophilie.
Ces sévices peuvent hélas se produire même dans les structures sociales officielles censées protéger les enfants en situation difficile. Très souvent, les affaires de ce genre sont étouffées ou sommairement traitées par l’administration et la justice. Sur le plan économique, les entraves bureaucratiques ralentissent régulièrement la compensation financière due à l’orphelin et au parent vivant de ce dernier. Elles sont nombreuses les veuves (très rarement les veufs) qui souffrent le martyre pour recouvrer leurs droits et ceux de leurs enfants. Il y en y a, parmi ces femmes héroïques, qui parviennent à s’en sortir dignement. Mais la plupart se trouvent poussées à “mendier” l’aide des proches et celles de l’Etat. Beaucoup d’autres choisissent malheureusement de sortir dans la rue tendre la main aux passants.
Dans ce cas dramatique, ce sont elles-mêmes, hélas, qui ne trouvent pas mieux que d’exploiter leurs enfants orphelins qu’elles traînent derrière elles en mendiant. Récemment, cette pratique parfois frauduleuse (puisqu’il peut s’agir de fausses veuves et de faux orphelins) s’est répandue parmi les familles de réfugiés syriens. Presque dans toutes les villes tunisiennes, le spectacle de ces jeunes femmes et de leur progéniture s’est particulièrement banalisé. Le citoyen trouve même étonnant que cette diaspora de mendiantes arabes adopte les mêmes méthodes et les mêmes formules pour attendrir les virtuels bienfaiteurs. C’est à croire que ces femmes s’organisent dans une sorte de réseau aux pratiques et au discours uniformisés !
Je dois avouer que, personnellement, j’ai failli à l’essentiel de mes devoirs par rapport aux orphelins de ma grande famille. Peut-être parce qu’on m’a rarement sollicité pour accomplir ce devoir. Mais certainement parce je n’ai jamais acquis véritablement ce réflexe solidaire. Dieu sait pourtant que mes lectures de l’enfance et de la jeunesse pouvaient me sensibiliser durablement aux drames divers des orphelins. Plus tard, j’ai côtoyé des cas très attendrissants auprès desquels je pouvais intervenir efficacement. En tout cas, ma contribution s’est bornée jusque-là à quelques gestes minimes et très occasionnels. Pour moi, hélas, l’enfer de l’orphelinat, ça n’arrive qu’aux autres. En même temps, et par mauvaise foi sans doute, je me dédouane de mes torts en jetant la pierre au Gouvernement et à l’Etat. J’ai encore du temps pour me rattraper. Commençons donc par cet article et ce mea-culpa ! Entre-temps, les intégristes jihadistes se dépensent et dépensent généreusement pour récupérer idéologiquement la cause des orphelins ! Qu’en pense notre misérable Gauche démocrate, elle-même orpheline désormais ?