Quand Hammamet vibre au rythme de la chanson française
Le 9 août 2025, la 59ᵉ édition du Festival International de Hammamet a offert au public une soirée placée sous le signe de l’élégance et de la nostalgie, avec “Sinfonica”, un hommage vibrant à la chanson française. Sous la direction du maestro tunisien Jihed Jbara, un large orchestre a donné vie à un répertoire intemporel, sublimé par la voix envoûtante de Zeineb Oueslati, révélation de la soirée, et la prestation habitée de Philippe Cavaillé, interprète passionné de Charles Aznavour.
Un voyage musical à travers le temps
Pendant deux heures, les gradins de l’amphithéâtre se sont transformés en machine à remonter le temps. Les notes familières de Charles Aznavour, Édith Piaf, Jacques Brel et Dalida ont enveloppé le public, le transportant dans une époque où la chanson racontait des histoires et touchait l’âme. “L’Hymne à l’amour” a ouvert la soirée dans un silence quasi religieux, avant que la magie ne se poursuive avec “La Foule”, “Padam, Padam”, “Je ne regrette rien”, “Quand on n’a que l’amour”, “Comme ils disent” ou encore “Emmenez-moi”.
Le public, mêlant toutes les générations, a chanté à l’unisson, porté par l’émotion brute des paroles et la richesse des arrangements orchestraux. Les plus nostalgiques ont fermé les yeux, laissant les souvenirs affluer, tandis que les plus jeunes découvraient l’âme d’un patrimoine musical universel.
Des interprètes au sommet
Philippe Cavaillé, ému par l’accueil du public tunisien, a salué “un peuple magnifique” et confié son plaisir de revisiter l’univers d’Aznavour, dont il maîtrise la complexité avec un respect palpable. Récent participant au film à succès Monsieur Aznavour avec Tahar Rahim, il a puisé dans cette expérience une intensité rare sur scène.
Après lui, Zeineb Oueslati a pris le relais avec élégance et assurance. Dans une robe sobre, mais armée d’une voix puissante et nuancée, elle a revisité le répertoire de Dalida avec justesse et sensibilité. “Paroles Paroles”, “Bambino”, “Salma ya Salama” et “Mourir sur scène” ont résonné comme un hommage vibrant à la diva, avant un final à deux voix sur “La Bohème”, improvisé au cœur du public — moment de pure complicité artistique.
L’art de réinventer les classiques
Préparer un tel florilège de reprises n’a pas été une tâche aisée. Jihed Jbara confie avoir travaillé avec minutie pour enrichir “Sinfonica”, afin de satisfaire un public francophone exigeant, en Tunisie comme ailleurs. Pour lui, chaque représentation est l’occasion de peaufiner, d’affiner et de faire grandir cette création musicale.
L’orchestre, avec ses cordes soyeuses, ses cuivres éclatants et ses rythmes délicats, a apporté une dimension symphonique aux chansons, donnant à ces standards une nouvelle vie, sans trahir leur âme originelle.
Une soirée gravée dans les mémoires
“Sinfonica” n’a pas seulement ravi les amateurs de chanson française. Il a su créer un pont entre générations, cultures et émotions, prouvant que ces mélodies intemporelles possèdent encore le pouvoir de rassembler.
À Hammamet, ce soir-là, la nostalgie n’était pas triste — elle était lumineuse, collective et vivante. Un moment suspendu, où la mer, les étoiles et la musique se sont alliées pour célébrer la beauté des mots et des notes.
Rim Khalifa